En 2020, l’AS Béziers Hérault est au cœur d’un feuilleton qui secoue le rugby français. Derrière le projet de reprise porté par Christophe Dominici se trouve un mystérieux investisseur : Samir Ben Romdhane.
Peu connu du grand public, il cultive le secret, n’apparaissant jamais en conférence de presse et ne donnant aucune interview. Les négociations sont menées par Philippe Baillard, directeur financier de Sotaco International, qui affirme lui avoir conseillé de rester dans l’ombre.
Baillard décrit un projet ambitieux dépassant les 30 millions de dollars annoncés, destiné à “réveiller la belle endormie” qu’était Béziers. Selon lui, le club était en grande difficulté financière, et le refus des cédants a privé “tout un peuple” de ce rêve.
Il assure que Ben Romdhane, qu’il présente comme irréprochable judiciairement, avait des contacts émiratis et allemands capables d’injecter massivement des fonds.
Cependant, des zones d’ombre persistent sur la fortune de Ben Romdhane et ses origines. Présenté comme émirati, il est en réalité né en 1962 à Bizerte (Tunisie) et domicilié à Paris. Ses entreprises, une dizaine de sociétés Sotaco aux ramifications internationales (Luxembourg, Singapour, Allemagne), semblent davantage des structures de représentation que des empires industriels.
Un acteur du dossier, anonyme, avance qu’il n’était pas milliardaire, mais seulement le représentant d’investisseurs émiratis intéressés par la viticulture… avant que le projet ne glisse vers le rugby.
Les rêves portés avec Dominici prenaient parfois des allures irréalistes : rachat d’un club de football en Corse et ambition de remporter la Ligue des champions. La rencontre avec le rugby s’est faite via l’achat d’un appartement de luxe à Paris, où ils croisent un viticulteur héraultais qui leur parle du club. L’achat se fera par le biais d’une société Sotaco, mais le paiement n’ira pas à son terme. En janvier 2023, la justice ordonne leur expulsion pour occupation sans droit ni titre.
En septembre 2020, deux mois après l’échec du rachat, un mystérieux “John Doe” contacte la rédaction de Midi Olympique. Cet homme, négociant en pétrole, prétend avoir travaillé avec Ben Romdhane entre la Libye, la France et l’Allemagne. Il l’accuse d’avoir trompé des partenaires pour 1,5 million d’euros et décrit un montage où un club serait acheté avec l’argent d’investisseurs émiratis placé sur le compte de Ben Romdhane, avant d’être “dépecé”.
John Doe envoie un mail signé de son pseudonyme, confirmant la thèse du représentant d’intérêts étrangers. Lui-même n’est pas exempt de zones grises, son nom apparaissant dans les Panama Papers pour des comptes aux Îles Vierges britanniques. Il demande surtout que Christophe Dominici soit averti du “traquenard” et conseille prudence et méfiance.
Quelques semaines plus tard, le 24 novembre 2020, le drame frappe : Christophe Dominici meurt tragiquement, laissant derrière lui un dossier jamais abouti et des zones d’ombre qui continuent d’alimenter les spéculations autour de Samir Ben Romdhane et du projet avorté de reprise de l’ASBH.






