
Alors que l’équipe de France féminine prépare son affrontement face à l’Angleterre en demi-finale de la Coupe du monde ce samedi à 16h30, un événement majeur se profile également en coulisses : l’Elite 1 adopte désormais le nom Axa Elite 1. Ce changement, officialisé par la Fédération française de rugby, marque l’entrée dans un partenariat clé avec l’assureur, une aide bienvenue pour un championnat encore en pleine évolution vers la professionnalisation.
Pour Florian Grill, un tremplin essentiel pour le futur du rugby féminin
Le président de la FFR souligne l’importance stratégique de cette avancée.
Il rappelle :
« Le développement de l’Elite 1 est un levier fondamental au développement de la pratique féminine et pour les performances de l’équipe de France future, d’où l’importance qu’on accorde à ce championnat et d’où le fait qu’on ait fait la poule unique il y a deux ans. »
Les budgets des clubs, oscillant entre 400 000 et 800 000 euros annuels, seront en partie renforcés grâce à ce partenariat, qui versera deux tiers des fonds pour améliorer les équipes techniques, les services médicaux ou encore les infrastructures. L’objectif est de faire grimper le financement total entre 1,8 et 2 millions d’euros, un seuil encore à atteindre, mais qui paraît accessible grâce à une pratique en forte croissance (+35 % de licenciées en un an, soit 52 000 joueuses).
Des Bleues éclatantes mais une réalité qui reste fragile
Si les performances et la médiatisation des Bleues font sensation, notamment avec 4,6 millions de téléspectateurs pour leur quart de finale contre l’Irlande, la vie des joueuses en club ne reflète pas toujours cet engouement.
Florian Grill reconnaît cet écart avec enthousiasme :
« J’avais dit qu’il y aurait un avant et un après Coupe du monde. C’est au-delà de mes espérances. Avec ces filles on a des personnalités qui sont inspirantes et attachantes. Elles sont à la fois des sportives de haut niveau exceptionnelles mais aussi des femmes accomplies qui ont des vrais parcours de vie et la France se projette. »
Un fossé encore important avec le rugby masculin
Alors que trente joueuses disposent désormais d’un contrat fédéral avec des salaires mensuels de 2 800 à 3 500 €, la majorité des autres évolue encore en semi-professionnelles. Au Stade Toulousain, par exemple, seules 14 joueuses perçoivent mensuellement entre 100 et 400 €, auxquels s’ajoutent des primes. D’autres ne reçoivent aucune rémunération.
La talonneuse Laure Touyé dépeint cette réalité sans filtre : « C’est plus dur d’avoir une vie tranquille, parce qu’on est encore amateurs aujourd’hui dans le rugby féminin. Donc tu es obligé d’avoir ton travail à côté ou de faire des études. Mais de faire quelque chose en plus parce que tu ne peux pas du tout vivre de ta passion aujourd’hui. »
Elle ajoute, consciente de la frustration : « Tout le monde pense que c’est professionnel, mais c’est vraiment encore considéré comme du rugby amateur. C’est dur et, quand tu es dedans, tu as envie que les choses avancent beaucoup plus vite que ça, parce que tu as l’impression que tu es en retard tout le temps. »
Un championnat qui cherche à prendre son envol
Céline Ferrer, ancienne internationale et aujourd’hui coach au Stade Toulousain, partage ce sentiment collectif : « J’ai quand même la sensation que ça stagne un petit peu. Bien sûr qu’il y a eu de l’évolution. Et là, j’ai la sensation que ça commence un petit peu à stagner. »
Elle souligne cependant l’importance des succès sportifs pour stimuler le mouvement : « C’est important de passer par ces étapes-là, c’est clair. […] Avec des résultats, on arrive à demander un petit peu plus de choses, c’est évident. »
Vers une professionnalisation accrue ?
Actuellement, 75 % des joueuses d’Elite 1 doivent concilier leur carrière sportive avec une activité professionnelle. La Fédération ambitionne de changer cette dynamique. Florian Grill précise : « La Fédé ne compte pas professionnaliser plus de 30 joueuses. Mais on aimerait que les clubs amènent à une professionnalisation non pas de 30 joueuses mais plutôt 300-400. »
Pour y arriver, il sera crucial de renforcer l’attractivité des clubs, d’accroître la visibilité médiatique et d’attirer davantage de sponsors. Céline Ferrer conclut avec pragmatisme : « Il y a des gens qui ont envie de nous suivre, la Fédé, des clubs qui vont peut-être professionnaliser de plus en plus les joueuses. Il faut aider les clubs aussi pour faire tout ça. Tout simplement. »







