
Figure majeure du rugby français pendant près d’un demi-siècle, Serge Blanco s’attaque désormais à un tout autre terrain de jeu : la politique locale. À 67 ans, l’ancien arrière du XV de France a officialisé ce jeudi sa candidature aux municipales de Biarritz, tournant ainsi une nouvelle page d’une vie faite d’élans, de prises de risques et de rebonds spectaculaires.
Si l’annonce n’a surpris personne sur la côte basque tant la rumeur enflait depuis septembre, elle marque tout de même un tournant pour celui qui fut tour à tour joueur de légende, patron du Biarritz Olympique, président de la LNR, vice-président de la FFR et entrepreneur.
Blanco justifie sa décision dans un communiqué où il dépeint l’état de sa ville, qu’il estime fracturée :
« Depuis une dizaine d’années, j’ai vu Biarritz se fracturer. Le pacte de confiance entre les Biarrots et leur mairie s’est rompu. La cohésion entre les quartiers s’est affaiblie, le cap s’est perdu. Ce constat me conduit aujourd’hui à me présenter. »
Il mènera une liste sans étiquette intitulée « Mon équipe, c’est Biarritz », dévoilée prochainement. Pour ses proches, ce virage n’a pourtant rien d’évident.
Denis Charvet, compagnon de route sous le maillot bleu, avoue via Le Parisien avoir été pris de court :
« Il m’a surpris. Ces derniers temps encore, quand je l’avais au téléphone, je l’appelais Monsieur le maire et il me répondait : Tu plaisantes. Je ne pensais pas qu’il se lancerait car ça n’a rien à voir avec tout ce qu’il a connu. On est loin du rugby, du sport. C’est un tout autre environnement. C’est la vie des gens. »
Un autre proche résume, lui, l’inépuisable appétit du personnage :
« Il suffit de voir ce qu’il a fait jusque-là. Il n’a pas arrêté, au prix de sa santé. Il a brigué tous les postes dans le rugby, il a fait des affaires, il ne lui manquait plus que la politique. Et depuis un petit moment, justement, il n’avait plus grand-chose à se mettre sous la dent. Il n’allait pas se retirer dans son coin, c’est mal le connaître. »
Une trajectoire faite d’éclats et de turbulences
Né au Venezuela, arrivé enfant à Biarritz, Blanco s’est construit par à-coups : ouvrier à ses débuts, puis joueur hors norme, avant de devenir dirigeant influent et entrepreneur ambitieux. Son incursion dans le monde des affaires, portée par le soutien du milliardaire Serge Kampf, s’est soldée par la liquidation de sa holding en 2020. Au BO, qu’il dirige aujourd’hui côté association, son passage a laissé une trace contrastée, à l’image de sa méthode : « J’ai convoqué le comité directeur, j’ai écouté chacun des membres puis je leur ai dit de démissionner. C’est comme cela qu’on avance. »
Cette personnalité volcanique, capable d’élans formidables comme de ruptures brutales, fait dire à Charvet :
« C’est un soliste. Il est insaisissable mais il est fidèle en amitié. C’est un leader, un combattant, un bulldozer. À la place de la maire de Biarritz, qui a tenu des propos très durs envers lui, je me méfierais. D’ailleurs, je pense qu’il va gagner l’élection. »
Une campagne déjà sous tension
Le projet immobilier autour du stade Aguiléra, porté par la maire LR Maider Arosteguy, a servi d’étincelle au retour de Blanco sur le devant de la scène locale. Le climat politique s’est tendu ces derniers mois. L’ancien international tente aujourd’hui de finaliser sa liste, non sans difficulté, dans une campagne qui pourrait rassembler jusqu’à huit candidats.
Dans un geste d’apaisement, la maire sortante a réagi en saluant « l’engagement de monsieur Blanco, comme celui de tous les autres candidats déclarés ou à venir ».
Reste à savoir si l’homme qui a tant brillé ballon en main saura trouver ses marques dans une arène où l’on gagne autrement. À Biarritz, son nom résonne depuis quarante ans : suffira-t-il cette fois à transformer l’essai ?







