Le pari sportif au sein des disciplines professionnelles reste un sujet sensible en France. Depuis plusieurs années, la législation interdit formellement aux sportifs de parier sur leur propre sport, même s’ils ne sont pas engagés dans la rencontre concernée. Cette règle vise à garantir l’intégrité des compétitions et à prévenir tout risque de conflit d’intérêts.
L’avocat montpelliérain Marc Gallix, expert en droit du sport, rappelle dans Midi Olympique que « depuis le 1er janvier 2018, les sportifs n’ont pas le droit de parier sur leur propre sport, même s’ils ne sont pas impliqués directement. C’est l’article 131-16 du code du sport. » Ce texte proscrit également la transmission d’informations confidentielles obtenues dans le cadre professionnel à des tiers susceptibles de parier, un procédé qu’il compare à un « délit d’initié » dans le monde financier : « le fait de disposer de par une position personnelle des informations particulières qui pourraient vous avantager. »
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la violation de cette interdiction n’entraîne pas automatiquement une sanction pénale. Ce sont en effet les fédérations sportives et ligues – en rugby la LNR, en football la FFF – qui détiennent la responsabilité de punir les contrevenants. « En fait, ce texte ne prévoit pas de sanctions spécifiques. Il délègue les sanctions aux instances sportives… Il s’agit bien sûr de blâmes, de matchs de suspensions ou d’amendes ou même de radiation », précise Maître Gallix. Les clubs disposent eux aussi de moyens disciplinaires. En revanche, parier sur d’autres sports reste libre, un rugbyman peut ainsi miser sans contrainte sur du tennis ou du football.
Mais lorsque la manipulation du résultat d’un match est avérée, la justice passe à la vitesse supérieure. Avant 2018, les tribunaux n’intervenaient que pour des cas d’escroquerie, comme lors de l’affaire du match truqué de handball de Montpellier en 2012, où Maître Gallix avait défendu un joueur. Désormais, la loi interdit clairement toute manipulation sportive : « Si la preuve de tels agissements est rapportée, le procureur de la République va déclencher les poursuites et les acteurs seront sous la menace de sanctions pénales. »
L’article L.223-3 du Code du sport prévoit jusqu’à 5 ans de prison et 500 000 € d’amende, sanctions aggravées en cas de bande organisée. De son côté, l’article 445-2-1 du Code pénal sanctionne aussi toute altération « du déroulement équitable » d’une rencontre support de paris, avec des peines doublées si les gains illicites dépassent un certain seuil.
Dans les faits, les condamnations à de la prison ferme restent rares, réservées aux manipulations les plus graves. Les juges privilégient souvent des peines avec sursis, mais les conséquences pour les sportifs restent lourdes : obligation de rembourser les gains, versements de dommages et intérêts, perte de sponsors, et rupture de contrats.
Au-delà de la lutte contre la fraude, cette réglementation répond à une réalité sociologique. « L’objectif de tout ça est aussi de lutter contre la véritable addiction qui s’est développée chez des sportifs qui sont un peu désœuvrés en dehors de la pratique de leur discipline », explique Maître Gallix, soulignant ainsi l’enjeu de la prévention dans le sport professionnel.







