Le tribunal correctionnel de Bayonne a rendu mardi une décision inattendue dans une affaire révélant surtout les failles d’une gestion interne chaotique, plutôt qu’un détournement de fonds.
L’ex-gérant de la boutique officielle de l’Aviron Bayonnais, poursuivi pour abus de confiance suite à la disparition de plusieurs dizaines de milliers d’euros, a finalement été relaxé. Mais au fil de l’audience, c’est le fonctionnement même du magasin qui a suscité l’étonnement des magistrats.
Selon une enquête relayée par Sud-Ouest, environ 57 000 euros en espèces ont disparu entre l’été et la fin 2024. Cette somme, conservée sans sécurité, était simplement rangée dans une boîte à chaussures dans un local accessible à de nombreuses personnes. Une méthode rudimentaire qui a rapidement attiré les soupçons.
Face à la présidente Mélanie Mistral, l’ancien responsable a reconnu les faits sans s’effondrer. La magistrate a toutefois rappelé que « le gérant du magasin est le seul responsable du suivi, il est responsable de la remise des espèces en banque ». Un rôle essentiel, tant les écarts dans les dépôts bancaires étaient parfois considérables.
Les anomalies ont frappé dès l’été 2024 : « Une première fois, vous avez déposé 8 800 euros, au lieu de 40 000. Une autre, 13 000 au lieu de 34 000 », a exposé la présidente. Un troisième écart de 5 000 euros a renforcé l’alarme donnée par l’expert-comptable, poussant à une plainte le 26 décembre.
La démission du gérant, annoncée à son retour de congés, a nourri les soupçons. Me Philippe Saladin a souligné : « On sait qu’il a été informé pendant ses vacances par un collègue de la disparition des espèces. Et quand il rentre, son premier réflexe est de démissionner… » La défense a réfuté cette interprétation, Me Élodie Garaffa affirmant : « Il a un projet de boutique avec son épouse depuis avril 2024, j’en apporte les preuves », écartant tout lien entre départ et pertes financières.
Lors d’une réunion interne, le gérant démissionnaire a reconnu les écarts sans en expliquer l’origine, ni admettre d’appropriation frauduleuse. Il a mis en cause la gestion du magasin : « Il fallait mettre l’argent dans une boîte à chaussure et la déplacer de temps en temps. Quand je suis arrivé, en 2022, j’ai dit qu’il fallait un coffre. On ne m’a pas écouté ». La boîte à chaussures était rangée dans un débarras partagé, accessible « à tous les employés mais aussi aux salariés d’un commerce voisin. C’était aussi les toilettes. » Cette situation rendait toute identification précise d’un responsable impossible.
Chargé de déposer l’argent liquide en banque tous les quinze jours pour des montants d’environ 10 000 euros, l’ex-gérant a admis avoir relâché la fréquence de ces remises : « Mais c’est vrai qu’à l’été 2024, on était sous l’eau, j’ai passé un mois et demi sans y aller ». Un manquement professionnel reconnu, mais jugé insuffisant pour caractériser un abus de confiance.
Les enquêteurs n’ont détecté aucun mouvement suspect sur ses comptes bancaires, ni sur ceux de son épouse. La procureure Caroline Parizel a rappelé : « Vous avez acheté un bien immobilier à la même époque, la banque a effectué le contrôle des fonds et aucune provenance douteuse n’a été constatée. » Aucun train de vie incompatible avec les revenus déclarés n’est apparu.
Après les réquisitions, le tribunal a pris trois minutes pour prononcer la relaxe.
Cette affaire laisse ainsi un vide derrière elle : une importante somme d’argent s’est évaporée sans responsable formellement identifié, révélant surtout un système de gestion des espèces défaillant et laxiste.







