
Un nouveau système de rémunération en Pro D2 et dans les divisions inférieures suscite inquiétudes et soupçons de fraude. Depuis plusieurs semaines, l’A2R s’intéresse à la pratique consistant à verser une large partie des salaires via des « conventions de droits à l’image », un procédé qui échappe largement au contrôle des autorités.
C’est le Midi Olympique qui a dévoilé les premiers éléments de ce dossier, révélant une possible nouvelle affaire de fraude susceptible d’éclater prochainement. Sur le papier, rien d’illégal ne semble transparaître. Cependant, certains documents consultés par les journalistes éveillent de sérieux doutes.
Ces documents concernent principalement des joueurs étrangers en Pro D2, sous des « contrats LNR proches du minimum conventionnel » – soit environ 23 000 euros brut annuels – ou en Top 14, à 42 000 euros. Mais ces contrats officiels sont complétés par une seconde rémunération, parfois équivalente voire supérieure, versée via des sociétés de communication privées, souvent créées ou promises par les joueurs eux-mêmes.
### Un salaire presque doublé… sans activité réelle
Ces conventions de droits à l’image prévoient des montants entre 36 000 et 48 000 euros par an, versés par ces sociétés. Officiellement, ces structures sont destinées à exploiter l’image des joueurs à des fins promotionnelles. En réalité, nombre de ces sociétés « n’existent que sur le papier ». En effet, leurs sites internet sont « en construction », sans aucun contenu, activité commerciale ou trace tangible d’exploitation de l’image des joueurs.
« C’est pour cela que l’on peut parler de faux droits à l’image », explique un expert-comptable collaborant avec plusieurs clubs professionnels. « Le club réduit ses charges sociales, et le joueur sort des radars de l’URSSAF et de l’administration fiscale. »
### Des contrats truffés d’incohérences
Les conventions portaient sur la saison dernière et celle en cours, et certaines présentent des anomalies flagrantes. Dans un des documents étudiés, un joueur international samoan est décrit comme ayant développé « une image forte et reconnue en tant que champion olympique ». Or, les Samoa n’ont « jamais remporté de médaille olympique en rugby à 7 ». Ce type d’erreur accentue les soupçons d’un montage standardisé, sans lien réel avec la notoriété ou la carrière des joueurs concernés.
### Un système loin d’être isolé
Après les affaires Pacific Heart et des fausses prestations – incluant des stages fictifs et des matchs amicaux jamais joués – récemment passées devant la commission de discipline et de régulation du rugby français, ces révélations confirment l’existence d’une problématique systémique.
Souvent, ce sont les joueurs les moins bien rémunérés qui sont exploités comme variables d’ajustement dans ces stratagèmes. L’intervention de l’A2R souligne l’enjeu d’équité financière entre clubs, mais aussi les risques majeurs encourus par les joueurs et dirigeants, exposés à d’importantes sanctions.
Le rugby professionnel français, qui pensait avoir tourné la page des montages opaques, semblerait aujourd’hui entamer un nouveau chapitre sombre de sa gestion financière.







