
Noël, marathon culinaire pour le grand public, devient véritable exercice d’équilibriste pour les joueurs de Top 14. Entre traditions festives et impératifs sportifs, les rugbymen doivent trouver le juste milieu, notamment quand un match les attend peu après le réveillon.
Cette fin d’année, près de 400 joueurs seront concernés par ce défi. Les préparateurs physiques n’ont pas de « recette miracle », mais plaident pour le bon sens et la modération. À Montauban, Cameron Ruiz, le préparateur physique de l’USM, résume sa philosophie sans dogme : « Ça me dérange de demander à un joueur de se priver de foie gras ou de ne pas manger un bout de bûche alors qu’on enchaîne des blocs de 12 matchs. Il faut qu’ils soient capables de ne pas se priver, d’être intelligents et de compenser. »
Le plaisir n’est donc pas banni, mais l’excès reste l’ennemi numéro un. Yohan Plé, responsable de l’alimentation du club, va dans le même sens : « On peut se faire plaisir pendant les fêtes ! Quelques fois dans l’année c’est possible, sans pour autant qu’il y ait des conséquences. » Son approche privilégie l’ajustement plutôt que l’interdiction : privilégier le miel ou le sirop d’agave au sucre, préférer les viandes blanches aux plats gras, et contrôler les portions pour éviter frustration et abus.
Chaque année, Cameron Ruiz établit une liste de recommandations adaptées : « Le foie gras en grande quantité ce n’est pas l’idéal. Ce qu’il faut comprendre, c’est que nous n’avons pas beaucoup de temps de repos en Top 14, donc il faut savoir allier plaisir et sérieux. Si on peut aller chercher un peu plus de protéines dans les repas de Noël c’est bien. » Son menu idéal ? Fruits de mer, dinde et patates douces, accompagnés d’une tarte aux fruits et sorbet. Une version revue et corrigée du traditionnel festin de Noël, pensée pour concilier fêtes et performance.
Les clubs anticipent également la période en aménageant la charge de travail. À Montauban, le repas de Noël est organisé tôt, léger, et les joueurs bénéficient seulement de trois à cinq jours de repos. Cette stratégie permet de limiter les excès : « Les joueurs ont une marge de 0,5 à 1 kg après les fêtes. On s’attend à des fluctuations de 1 à 2 kg et si les joueurs vont courir, le corps ne devrait pas tout stocker », explique Ruiz. La reprise se fait avec une légère augmentation du volume d’entraînement, sans intensification excessive, pour remettre la machine en route sans punir.
Le véritable danger survient quand les vacances s’allongent, ce qui est rare en Top 14 contrairement à la Pro D2. Ruiz s’en amuse en évoquant un cas extrême : « La plus grosse prise de poids que j’ai connue, c’est un joueur qui est revenu des vacances avec 17 kilos en 15 jours. C’était un peu de l’abus (sourire). Chez les professionnels, je crois que la plus grosse prise de poids c’était 8 kilos. Avec seulement trois jours, cela peut éviter le carnage culinaire. »
Au final, chaque joueur gère son plaisir comme il l’entend. Le pilier Léo Aouf confesse son faible non pas pour la bûche, mais pour le fromage : « Je me fais un peu plaisir sur le repas du 24 décembre. Mon péché mignon, c’est le fromage. Mes grands-parents font souvent des grands plateaux de fromages et j’avoue que j’adore ça. Mais j’ai de la chance, j’élimine facilement ! »
Entre dinde, foie gras et séances d’entraînement, le message est clair : recharger l’esprit sans alourdir le corps. Peut-être que le secret de la performance se trouve dans cet équilibre, où plaisir et modération font bon ménage.







