
En l’espace de quinze mois, Ugo Seunes, ouvreur de 24 ans, a effectué une ascension fulgurante, passant de la Nationale jusqu’au Top 14. Malgré ce parcours éclatant, il conserve un regard émerveillé sur son évolution.
Il s’est ainsi ouvert lors d’une interview pour L’Équipe :
« Le truc qui m’a le plus émerveillé depuis que je suis au Racing, c’est d’aller à Perpignan et d’en revenir le soir même en avion privé ; c’était lunaire ».
Le fait qu’il occupe désormais le poste de n°10 dans un club réputé pour ses ouvreurs de talent relève presque du hasard assumé :
« Je n’aurai jamais la carrière de tous ces grands numéros 10, a-t-il confié en souriant. Moi, je ne voulais pas être pro. Mais je n’ai aucune rancune envers Agen (son club formateur) qui ne m’a pas conservé après la catégorie Crabos (juniors). C’est ainsi que j’ai pu poursuivre mes études de commerce à Toulouse tout en jouant à Blagnac. On y était bien. Je serais peut-être encore là si le club n’avait pas rencontré des difficultés financières. »
À Blagnac, Christophe Deylaud a rapidement détecté son potentiel atypique :
« Il s’était bien intégré à Blagnac et si je ne lui avais pas mis un coup de pouce pour passer les essais à Aurillac, je ne suis pas certain qu’il y serait allé. Il a ce profil d’amateur, un véritable passionné de rugby, pas du tout obsédé par l’obtention d’un contrat. »
Leur première rencontre demeure un épisode mémorable :
« Il s’en souvient sûrement aussi ! Je le reçois sur la recommandation de Jérôme Miquel (ancien ouvreur d’Agen) qui me précise que c’est le fils d’un ami. Je fais le tour du club avec lui et lui annonce qu’il s’entraînera avec les juniors. Mais lui me répond avec son petit cheveu sur la langue : “Ah ben, si c’est pour jouer avec les juniors, moi je vais ailleurs”. Vraiment ? Je le prends au mot et je l’envoie le lendemain avec les Espoirs en lui expliquant dès le premier entraînement qu’il se trompe sur lui-même, que ce n’est pas à Blagnac qu’il doit rester. Résultat ? Il a rapidement mis tout le monde d’accord. »
Ugo Seunes assume pleinement son parcours atypique :
« Je trouve qu’il est plus intéressant de disputer des matches avec l’équipe première en Fédérale 1 plutôt qu’en Espoirs », déclare-t-il, ajoutant : « Avant Aurillac, j’avais reçu des propositions de clubs de Pro D2, mais cela ne m’attirait pas. »
Une philosophie que résume parfaitement Deylaud :
« Ce qui fait la force de ce gamin, c’est sa liberté, affirme Deylaud. Ugo n’est pas un joueur formaté. Il ne répète pas mécaniquement ce qui lui a été enseigné dans les centres de formation. C’est un joueur. Sur le plan rugbystique, il est rusé. Et quand on est rusé, on cherche à déjouer l’adversaire. Ugo est un joueur de lecture, il observe ce qui se passe autour et n’a pas peur de tenter des choses. Oui, cela comporte des risques, mais ce joueur peut faire pencher la balance dans un match. Il sait aussi quand il faut se plier aux exigences du jeu. S’il faut faire des tirs au but toute la journée, il le fera sans problème. »
Arrivé à l’Arena, il a d’abord fait preuve d’une prudence excessive :
« Je viens de Pro D2, à un poste clé où l’on a toujours eu des internationaux, et j’ai voulu être trop carré, confie-t-il. Le premier mois, je n’ai pas été très performant à l’entraînement. J’ai fait autant de pertes de balle que dans toute ma carrière. Je ne jouais pas mon jeu. Puis je me suis dit qu’il fallait que j’utilise le match contre Bordeaux (sa première titularisation, victoire du Racing 44-32) pour montrer à l’équipe qu’elle pouvait compter sur moi. Même si je ne suis pas un grand nom. »







