
Les performances éclatantes de Matthieu Jalibert relancent le débat autour du poste crucial d’ouvreur en équipe de France, tandis que le Toulousain incarne une prestation plus discrète ces dernières semaines.
« Encore une masterclass », « sur une autre planète » : l’ouvreur bordelais, désormais plus solide en défense, enchaîne les matchs de haut niveau et impose son talent avant le Tournoi des Six Nations. Désigné homme du match lors des deux victoires de l’UBB en Champions Cup cet automne et auteur dimanche dernier contre Toulon de sa 19e passe décisive en Top 14 cette année, Jalibert confirme son statut de moteur. Son manager Yannick Bru souligne « un altruisme, un leadership et une envie de donner du carburant à toute l’équipe » qui émerveillent.
Pour Noel McNamara, entraîneur de l’attaque à Bordeaux-Bègles, « Pour moi c’est un des meilleurs ‘dix’ du monde, peut-être le meilleur, avec sa capacité à attaquer l’espace, sa vitesse pas vraiment normale pour un ‘dix’, sa longueur de pied ». Il ajoute : « Il a cette capacité à scanner les défenses et à vite prendre la bonne décision. Il a une valise pleine de solutions. »
À son arsenal offensif, jalonné de six essais en Top 14 cette saison, Jalibert a ajouté un impact défensif souvent critiqué durant ses passages en Bleu. Cette progression est le fruit de son travail avec Aurélien Cologni, ex-joueur de rugby à XIII et préparateur défensif d’UBB depuis plus d’un an.
Un défenseur qui s’ignorait
« Matthieu est un très bon défenseur, il a tout le bagage, c’est juste que ça dormait en lui », expliquait Cologni en septembre dernier. Jalibert confirme : « C’est surprenant mais c’est effectivement la première chose qu’il m’a dite. » Le joueur a d’abord cru qu’« il est fou, ou qu’il a vu quelque chose en moi que personne n’a encore perçu ».
« Je sais que (la défense) n’est pas mon point fort, mais je n’ai jamais considéré que j’étais un joueur qui s’échappait », poursuit-il. Il a ainsi travaillé « sur des situations réelles pouvant se reproduire en match. C’est loin d’être parfait, je vous l’accorde, mais en tout cas, je donne mon max pour augmenter mes stats et ma qualité de défense. »
Ce bond en arrière sur la hiérarchie des ouvreurs tricolores pourrait-il faire vaciller Romain Ntamack, titulaire depuis la défaite en Angleterre (26-25) en février dernier ? Les prestations mitigées de Ntamack cet automne, face à la forme éclatante de Jalibert, ont ouvert une brèche… mais le retour d’Antoine Dupont, après huit mois d’absence, remet les choses en perspective.
Sur les 35 sélections de Jalibert en Bleu, douze ont coïncidé avec Dupont à la mêlée. Pourtant, nombreux sont ceux, y compris le sélectionneur Fabien Galthié, à penser qu’« ils ne peuvent cohabiter au nom d’un certain équilibre », les deux joueurs étant avant tout des créateurs offensifs plus que des gestionnaires.
Galthié « m’a dit que je pouvais rentrer chez moi »
Le parcours de Jalibert en équipe de France, débuté à 19 ans en février 2018, a toujours oscillé entre éclairs de génie et désillusions. Si le Bordelais a souvent sauvé les Bleus par ses inspirations, notamment à Rome en 2023, il a aussi connu des tensions avec Galthié, qui l’avait rétrogradé dans la hiérarchie avant le Tournoi 2023.
« J’ai eu une longue discussion avec (Galthié), ça restera entre nous. Il m’a dit qu’il ne me sentait pas très bien, que je pouvais rentrer chez moi. Donc je lui ai dit que je préférais rentrer », confiait alors Jalibert.
Depuis, son évolution est spectaculaire. Défensivement plus solide, champion d’Europe avec Bordeaux-Bègles où il a brillé en finale avec deux passes décisives contre Northampton, Jalibert semble aujourd’hui marcher sur l’eau. Reste à savoir si cette forme exceptionnelle suffira à faire pencher la balance dans la sélection tricolore.






